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Chapitre 10 Un modèle indépendant de la mesure altimétrique : FES98

10.1 Présentation du chapitre

Au milieu des années 90, les solutions FES94.1 et FES95.2 offraient à la communauté scientifique des nouveaux types de solutions globales de marées. Dans la continuité des améliorations sans cesse réalisées sur les modèles FES (Finite Element Solution), nous sommes à même de calculer une nouvelle solution globale qui tient compte des apports de l’assimilation de données grâce à la méthode des représenteurs introduite dans le chapitre précédent. Cette méthode d’assimilation va nous permettre d’inclure les informations de terrain dans notre modèle afin de produire de nouvelles solutions pour les principales ondes du spectre de marée. En premier lieu dans ce chapitre, nous mettrons en place les améliorations à apporter au modèle hydrodynamique. Puis nous quantifierons les solutions hydrodynamiques obtenues. Enfin, nous utiliserons la méthode d’assimilation basée sur les représenteurs pour améliorer nos solutions en dénivellation, au moyen de données marégraphiques. Nous produirons ainsi des solutions de qualité en zones côtières et sur les plateaux tout en étant indépendant de la mesure altimétrique. Les nouvelles solutions seront nommées FES98.

10.2 Calcul des solutions hydrodynamiques libres

10.2.1 Division du maillage

Pour les calculs des solutions FES à l’échelle globale, les équations sont résolues sur un maillage global éléments finis. La génération d’un maillage est longue et coûteuse en temps de calcul. Un des buts premiers dans cette étude étant de vérifier le code d’assimilation sur une couverture globale, nous avons réutilisé le maillage élément finis couvrant globalement les océans et utilisé pour calculer les solutions FES94.1 et FES95.2 (cf. Figure 45). Nous avons préféré refaire un maillage beaucoup plus précis ultérieurement. Une augmentation immédiate de la précision aurait apporté de trop nombreux problèmes informatiques à résoudre simultanément avec le débuggage du code d’assimilation.

Malgré tout, la taille du maillage est trop grande pour permettre une résolution globale. Il a donc été divisé en plusieurs sous domaines (les noms entre parenthèses sont les termes génériques des bassins utilisés dans le code) :

Nous donnons dans le Tableau 16 les différentes caractéristiques des bassins en termes numériques. Ces données sont essentielles pour la résolution du modèle. Elles permettent de dimensionner tous les paramètres et les tableaux numériques qui interviennent au cours des calculs. En effet pour nous affranchir au maximum de tous les problèmes de débordements de tableaux (véritables fléaux du programmeur…) au cours de l’exécution du code CEFMO, toutes nos déclarations de tableaux sont statiques et non dynamiques.


Figure 45 : Maillage global pour le calcul des solutions FES94.1, FES95.2 et FES98


Bassin
Nombre d’éléments triangulaires
Nombres de nœuds en Lagrange-P2
Nombre de conditions aux limites ouvertes en Lagrange-P2
ARCTIC
18 787
41 858
100
ATLNORD
16 129
3 5695
211
ATLSUD
20 585
43 817
171
HUDSON
3 315
7 564
17
INDIEN
18 695
40 804
276
MALAYSIE
14 787
31 556
251
MEDITER
11 350
23 998
5
PACNORD
20 897
45 913
280
PACSUD
20 044
43 487
250
Total
144 589
314 692
1 561

Tableau 16 : Caractéristiques numériques des différents bassins océaniques utilisés dans CEFMO

Dans un premier temps, tous les calculs se font indépendamment pour chaque bassin.

10.2.2 Résolution numérique

Les calculs des solutions de marées sont effectués sur les supercalculateurs CRAY de l’IDRIS par la soumission de jobs en batch. Les solutions sont assemblées sur des stations de travail Sun Ultra 1. Afin de faciliter et d’automatiser les calculs, un script de soumission a été établi au niveau mondial. Pour calculer les ondes M2 et K1, les calculs se décomposent en quatre étapes principales : Pour calculer les ondes S2, N2, K2, 2N2, O1, et Q1 les calculs se décomposent en deux parties principales :

10.2.3 La résolution par blocs

10.2.3.1 Principe

Le calcul d’une solution de marée au niveau global est coûteux en temps de calcul et en place mémoire. Les ordinateurs actuels ne permettent pas de calculer une solution globale de marée sur le maillage global éléments finis que nous avons considéré. C’est pourquoi, en prenant en compte les caractéristiques des moyens informatiques mis à notre disposition par l’IDRIS, le maillage de la surface océanique a été divisé en plusieurs sous domaines. Les solutions sont calculées indépendamment les unes des autres sur chacun des sous domaines en imposant des conditions aux limites aux frontières partagées. Pour chaque bassin ces frontières partagées sont des frontières ouvertes et les côtes représentent les frontières fermées. Puis, par la linéarité du modèle, une résolution finale utilisant les calculs effectués pour chacun des sous domaines, permet d’assembler la solution globale. Nous reprenons et expliquons de manière plus approfondie cette méthode développée initialement par Lyard [1998].

10.2.3.2 Système par blocs

Considérons le problème global obtenu en additionnant N-1 bassins océaniques séparés. Les inconnues sont triées par bassin sauf les inconnues qui sont à la frontière de deux bassins différents. Ces inconnues partagées sont assemblées dans un Nième vecteur : elles appartiennent toutes à des frontières ouvertes. Par ce formalisme, le modèle hydrodynamique global des N-1 bassins est équivalent au système :

(10.110)

avec :

De (10.110) nous pouvons déduire :

(10.111)

(10.112)

10.2.3.3 Solution a priori : système contraint

Dans notre cas, nous cherchons à retirer l’action du forçage que nous imposons par des conditions aux limites sur les frontières ouvertes de l’ensemble des bassins. Nous voulons obtenir une solution globale qui n’a plus d’interdépendance fixée par ces conditions aux limites entre les différents bassins du domaine global. Ainsi, notre but est de calculer la part des solutions de marée qui est due aux forçages (que nous imposons a priori sur les frontières ouvertes) et la part du forçage naturel (pour simplifier nous emploierons le terme de forçage naturel pour désigner le forçage astronomique plus le forçage des effets secondaires). Comme le système est linéaire, si nous retirons l’influence de ces conditions aux limites imposées sur les frontières ouvertes, nous accéderons aux solutions purement hydrodynamiques qui ne sont que la conséquence du forçage naturel.

Notre système hydrodynamique est linéaire, donc nous pouvons chercher les vecteurs  sous la forme :

(10.113)

avec :

10.2.3.4 Système libre

Les vecteurs qui nous intéressent sont les vecteurs  car ils sont exempts de l’influence des conditions aux limites qui nous permettent a priori d’assurer le calcul des solutions de marées sur chaque sous domaine et la continuité entre les sous domaines du maillage de l’océan mondial.

Ainsi, d’après (10.110) le système a priori sans condition aux limites imposée s’écrit :

(10.114)

Nous n’avons plus de dépendance en  puisque les conditions aux limites sont nulles dans le calcul des . Nous ne considérons que la part du forçage astronomique. Nous en déduisons :

(10.115)

et,

(10.116)

Soit :

(10.117)

10.2.3.5 Système de perturbation

Les vecteurs  peuvent être considérés comme des perturbations de la solution libre. En effet, ils représentent la contribution dans la solution forcée des conditions aux limites forcées, sans influence du potentiel naturel. Ainsi, d’après (10.110) le système qui est l’unique conséquence des conditions aux limites imposées s’écrit :

(10.118)

En effet, il n’y a pas de dépendance autres sur les frontières :

(10.119)

10.2.3.6 Réduction des matrices d’inversion

La technique de résolution par blocs consiste à éliminer les vecteurs de (10.112). En reportant, les valeurs des vecteurs  données par (10.111) dans (10.112) pour tous les indices i variant de 1 à N1, nous obtenons après simplifications :

(10.120)

Il nous faut maintenant résoudre (10.120) pour déterminer . Le problème ici est que cette résolution implique le calcul de l’inverse de la matrice globale  ce qui est impossible étant donnée la taille de cette matrice. Le calcul direct est donc compromis. Il faudrait utiliser une résolution itérative, lourde et coûteuse pour résoudre (10.120).

Cependant, nous remarquons que la matrice inverse  est multipliée par des matrices  et  telles que tous les coefficients de la matrice inverse ne sont pas nécessaires. En effet, les matrices  et  ne contiennent que des coefficients d’équations ne faisant intervenir que les nœuds frontières et les nœuds auxquels ils sont connectés, c’est-à-dire les nœuds voisins de ces nœuds frontières. Les inconnues strictement intérieures d’un bassin i peuvent être séparées en deux groupes :

En classant les inconnues des bassins suivant le groupe 1 et le groupe 2, nous avons :

(10.121)

Introduisons la notation ~ qui indique que les vecteurs ou les matrices sont réduits à leurs seuls blocs en relation avec les inconnues du bassin océanique i. Le problème avec conditions aux limites imposées devient :

(10.122)

Nous avons alors :

(10.123)

Si nous distinguons les deux groupes d’inconnues strictement intérieures, il vient :

(10.124)

Le terme est dimensionné par le carré du nombre de nœuds qui sont voisins d’au moins un nœud partagé sur une frontière ouverte. Ce terme peut être calculé par les matrices inverses déduites du problème a priori (méthode de réponse impulsionnelle) sur chacun des bassins.

Une fois que nous avons calculé les termes , nous en déduisons les termes . Puis nous pouvons calculer  à partir de (10.120). Une fois que nous avons calculé le vecteur , nous pouvons le reporter dans (10.117), ce qui nous donne le vecteur . De là nous en déduisons les vecteurs . Nous avons ainsi résolu le problème de détermination des inconnues aux frontières ouvertes.

10.2.3.7 Calcul

Si les solutions sont contraintes par les conditions aux limites  aux frontières ouvertes, alors la solution vectorielle des nœuds partagés est donnée par :

(10.125)

Une fois que le problème de détermination des inconnues aux frontières ouvertes est résolu, nous pouvons calculer les inconnues intérieures de chaque domaine grâce à la formule :

(10.126)

Ainsi, nous obtenons les solutions libres de notre système hydrodynamique.

10.2.4 Outils de comparaison

Pour évaluer la qualité des nouvelles solutions FES98, les comparaisons ont été faites avec des banques de données de différentes origines (marégraphie et altimétrie) et la RMS introduite dans le paragraphe 7.4 et dont nous rappelons l’expression:

(10.127)

avec :

De plus, afin de rendre compte globalement de la qualité des solutions (en prenant en compte toutes les ondes calculées), nous introduisons une Root Sum Square (RSS) :

(10.128)

10.2.5 Calcul des solutions forcées et libres

Avant de calculer de nouvelles solutions globale de marée sur notre maillage éléments finis, nous avons révisé quelques paramètres d’entrée de notre modèle par rapport aux calculs des solutions précédentes FES94.1 et FES95.2.

10.2.5.1 Conditions aux limites

Comme nous l’avons vu plus haut, il n’est pas possible de calculer d’un seul bloc les solutions de marées à une échelle globale. Le calcul se fait sur chacun des 9 sous domaines. L’assemblage de ces sous domaines constituera la solution globale. Pour les calculs, il faut donc imposer des conditions aux limites fermées pour les points des maillages qui sont sur des côtes et des conditions limites ouvertes pour les points des maillages qui sont frontières avec un autre maillage (dernière colonne du Tableau 16). Les conditions aux limites fermées imposent un flux de vitesse nul aux frontières du domaine considéré. Les conditions aux limites ouvertes sont imposées par le modèle de marée CSR3.0 [Eanes and Bettadpur, 1996]. Au moment de nos calculs, ce modèle était considéré par la communauté scientifique comme un des meilleurs modèles globaux de marée particulièrement en plein océan [Shum et al., 1997]. Les solutions obtenues dans ce cas sont appelées solutions forcées. Nous verrons dans la suite que ces conditions aux limites ne sont utilisées que pour assurer une convergence plus rapide des solutions au cours du calcul itératif. En effet grâce à un ultime calcul, du fait de la linéarité des équations, il est possible de retirer l’influence de ces conditions aux limites grâce à la méthode de résolution par blocs introduite dans le paragraphe 10.2.3.

10.2.5.2 Mode de calcul

Dans le cas des zones littorales, l’hypothèse d’une onde M2 dominante n’est plus vérifiée partout (exemple de l’océan Arctique [Lyard, 1997] et de la Mer Jaune [Lefèvre et al., 1999c]). Nous avons donc effectué tous nos calculs suivant un mode dit ‘combin’é. Ce mode tient compte de l’effet de deux ondes dominantes dans le calcul des coefficients de frottement au cours des itérations effectuées dans le code CEFMO. Ainsi, nous avons considéré que l’onde M2 est dominante dans certaines zones de l’océan mondial et que par complémentarité, l’onde K1 l’est dans les autres.

10.2.5.3 Bathymétrie

La base de données ETOP05 [National Geographic Data Center, 1987] a été complétée sur les plateaux continentaux et des mers particulières comme la Mer de Ross ou la Mer de Weddell [Le Provost et al., 1994]. Ces améliorations sont le fruit d’études locales basées sur des fonds de cartes et des collectes de points de sondes. La bathymétrie a été projetée sur nos grilles éléments finis.

10.2.5.4 Effets de charges et d’auto-attraction

Pour FES94.1 des cartes globales des effets de charges et d’auto-attraction avaient été calculées par Francis et Mazzega [1990] en se basant sur les solutions de Schwiderski [1980c]. Mais la résolution de ces dernières n’est que de 1x1 degrés. De nouvelles cartes ont été calculées à partir de la solution de marée CSR3.0 (Francis, communication personnelle, 1995), avec une résolution de 0,5x0,5 degrés. Une résolution plus fine apporte donc une meilleure prise en considération des gradients. La résolution de ces effets de charge près des côtes, là où la dissipation énergétique est la plus forte, est donc elle aussi améliorée. Afin de bien rendre compte de l’amélioration apportée entre les anciennes cartes et les nouvelles cartes de charges et d’auto-attraction, nous donnons Figure 46 la différence des deux solutions citées précédemment. Comme nous pouvons le voir, des différences supérieures au centimètre sont présentes au milieu de l’océan Atlantique, et de plus de 2 cm dans certaines mers littorales comme la Mer de Weddell, la Baie de l’Hudson, la Mer d’Irlande


Figure 46 : Différences entre les anciens effets de charges et d’auto-attraction basés sur les solutions de marées de Schwiderski et ceux basés sur CSR3.0

10.2.5.5 Coefficients de frottement

Dans le modèle de résolution par éléments finis, le coefficient de frottement est paramétrisé par une loi quadratique. Un coefficient de type Chézy est utilisé empiriquement dans la modélisation. Ce coefficient a été déterminé par des études sur le plateau continental européen. Etant essentiel à la bonne représentation de la dissipation et donc à la bonne qualité de nos solutions, nous avons entrepris plusieurs simulations avec des coefficients de Chézy différents afin de déterminer si, d’une part, la valeur habituellement utilisée est optimale à l’échelle globale, et si, d’autre part, cette valeur n’est pas différente suivant les bassins océaniques. La valeur communément prise à l’échelle de calculs globaux étant 3x10-3, nous avons effectué différentes simulations globales autour de cette valeur avec 6 coefficients de frottement différents : afin de dégager une valeur seuil optimale.

Pour comparer les différentes solutions calculées nous avons eu recours à la base de données marégraphiques ST95 introduite dans le paragraphe 7.4. Nous avons calculé les différentes RMS des solutions hydrodynamiques libres, c’est-à-dire qui n’ont subit aucun forçage (Tableau 5).
 

Coefficient de frottement
RMS (cm)
2x10-3
13,22
2,5x10-3
13,13
3x10-3
12,84
3,5x10-3
13,15
4x10-3
13,21
5x10-3
13,34

Tableau 4 : RMS des solutions de marées mondiales en fonction des coefficients de frottement

Ces résultats montrent que la meilleure RMS reste celle avec le coefficient de frottement 3x10-3. Cependant, nous avons effectué la différence entre les solutions que nous avons calculées (solutions avec 6 itérations et conditions aux frontières ouvertes imposées, c’est-à-dire jusqu’à l’étape 2 du calcul par CEFMO) et la solution CSR3.0. Une rapide étude graphique des solutions obtenues comparée à une des meilleures solutions de marée mondiale, semble montrer que suivant les zones océaniques considérées ce coefficient est plus ou moins bien adapté. Ainsi, par des études locales, nous avons déterminé les meilleurs coefficients de frottement pour nos 9 domaines océaniques :

Avec ces nouvelles valeurs nous avons assemblé une nouvelle solution globale. Mais le calcul de la RMS obtenue avec la base de données marégraphiques ST95 est de 13,40 cm. Cette valeur est plus élevée que les RMS calculées avec des coefficients de frottements constants sur toute la couverture océanique, ce qui tend à prouver que la variation du coefficient sur un bassin influe sur le calcul des solutions d’un autre bassin. Il faut donc comprendre le mécanisme de dissipation de l’énergie afin de trouver le bon coefficient de frottement sur chacun des bassins avant de pouvoir fixer le frottement sur chaque bassin.

Nous avons donc utilisé un coefficient de type Chézy égal à 3x10-3 pour toutes nos simulations globales.

10.3 Assimilation de données marégraphiques

10.3.1 Intérêts de l’assimilation

La plupart des modèles globaux de marées disponibles à ce jour sont issus de l’analyse de données altimétriques (T/P et ERS1/2). Ils ont apporté de grandes améliorations en regard des modèles globaux de marées plus anciens et ont atteint des précisions de l’ordre du centimètre en plein océan [Shum et al., 1997]. Cependant des différences plus importantes sont constatées en petits fonds (plateaux continentaux et zones côtières) à cause de la complexité et des caractéristiques spécifiques des ondes de marées dans ces zones. Les longueurs d’onde sont plus courtes et les amplifications régionales, souvent dues aux résonances locales, conduisent à de forts gradients qui sont difficilement modélisables par les modèles cités précédemment. De plus des effets non-linéaires prennent place dans ces zones, ce qui génère un spectre de marée beaucoup plus complexe que dans le plein océan.

Les analyses des données satellites sont précises en plein océan, ce qui explique la grande qualité des modèles globaux récents. Cependant près des côtes, ces analyses ne peuvent pas être aussi précises du fait de problèmes techniques lors de la mesure. En effet, des corrections à faire ne sont plus aussi bonnes en zones côtières telles les corrections ionosphériques et troposphériques qui nécessitent une mesure par le radiomètre de T/P à une distance d’au moins une trentaine de kilomètres des côtes.

D’autre part, les marégraphes sont peu présents en plein océan (quelques marégraphes plongeurs dans les eaux profondes), mais ils sont très nombreux le long des côtes. En outre, les mesures marégraphiques sont très précises du fait de leur courte période d’échantillonnage (en général une heure) et de la qualité de la méthode d’analyse harmonique utilisée. Ainsi, les marégraphes fournissent une information précise du phénomène de marée qui prend place en eaux peu profondes comparés aux données de marées extraites de l’altimétrie. En effet, la qualité de ces dernières est limitée par les problèmes d’aliasing et de résolution spatiale dans ces zones.

Ainsi, notre but a été d’utiliser cette information apportée par les mesures marégraphiques grâce à notre méthode d’assimilation, pour calculer de nouvelles solutions éléments finis de marée (FES98). Ces solutions sont globales, améliorées le long des côtes et sur les plateaux et indépendantes de l’altimétrie.

10.3.2 Schéma de l’assimilation

Comme nous l’avons mentionné ci-dessus, les solutions libres manquent de précision. L’utilisation d’une méthode d’assimilation de données marégraphiques qui tient compte des informations apportées par la mesure de terrain, va nous permettre de réduire les erreurs constatées entre ces solutions libres et des données in situ. La méthode d’assimilation a été présentée dans le Chapitre 9. Rappelons juste qu’un représenteur est calculé pour chacun point de mesure qui doit être assimilé. Il est représentatif d’une perturbation instantanée à l’endroit de la donnée assimilée, cette perturbation se propageant parmi l’océan mondial dont la surface est modélisé de manière discrète par la grille éléments finis. C’est pourquoi l’information hydrodynamique de la marée est conservée car elle est intrinsèquement contenue dans le représenteur. Les dimensions de chaque représenteur sont celles du champs de dénivellation de la marée. La solution assimilée complète est égale à la somme de la solution libre plus une combinaison linéaire de représenteurs pondérés par une valeur (poids) significative. Les poids sont déterminés par les confiances qui sont allouées à chaque donnée assimilée et par la minimisation d’une fonction coût.

10.3.3 Données marégraphiques assimilées

10.3.3.1 Sélection des banques de données marégraphiques

L’utilisation de données marégraphiques est un des buts principaux de notre travail, afin d’améliorer la modélisation de la marée dans les eaux peu profondes tout en restant indépendant de l’altimétrie. Le paragraphe 7.3 a introduit trois banques de données marégraphiques : WOCE, IAPSO, BHI. Nous avons sélectionné nos données à assimiler parmi ces banques. Un gros effort pour filtrer les bonnes données des mauvaises a été entrepris (en particulier pour la banque BHI). En effet, jusqu’à notre étude, aucun travail à notre connaissance n’avait été entrepris pour sélectionner des données marégraphiques à l’échelle mondiale dans un but d’amélioration de solutions de marée grâce à une technique d’assimilation.

Nous avons scindé notre sélection en deux parties. Une partie des marégraphes est réservée pour effectuer des comparaisons (ils proviennent des banques ST95 et ST727). L’autre partie est utilisée pour l’assimilation. Cependant dans certaines zones, il y a tellement peu de données marégraphiques, que nous avons estimé nécessaire d’utiliser ces données à la fois pour les comparaisons et l’assimilation. C’est pourquoi, nous mettrons en place une banque de données altimétriques indépendante de ces données marégraphique afin de comparer nos solutions FES98. Ainsi, nous avons extrait de ces banques de données une banque réduite pour chacune des huit ondes calculées. Ces banques réduites ont été choisies pour être représentatives de la physique des ondes de marées à la fois en plein océan et le long des côtes. De même que pour la construction de ST727, plusieurs critères ont été appliqués pour sélectionner ces banques réduites à partir des banques WOCE, IAPSO et BHI :

Les critères appliqués ont surtout permis de sélectionner les marégraphes de la banque BHI. Ces critères ont été utilisé indépendamment pour chaque onde. Au moyen de cette approche, nous avons retenu plusieurs centaines de marégraphes pour chacune des ondes calculées (cf. Tableau 17).
 
Onde
Nombre de données assimilées
M2
763
S2
733
N2
623
K2
636
2N2
232
K1
877
O1
881
Q1
634

Tableau 17 : Nombre de données assimilées suivant les ondes pour obtenir FES98

Le nombre de marégraphes sélectionnés varient suivant les ondes. En effet, les analyses harmoniques de la banque BHI ont été faites par de nombreuses personnes depuis deux siècles. Ces dernières ont utilisé des algorithmes de calculs différents sur des séries temporelles de mesures de qualité variable, ce qui ne permet d’obtenir le même nombre d’ondes pour chacune des décompositions harmoniques de cette base.

La Figure 47 présente les cartes de localisation des données marégraphiques assimilées dans FES98 pour les huit ondes principales.


Figure 47 : Localisation des données marégraphiques assimilées

10.3.3.2 Procédure d’assimilation

L’algorithme de calcul par les représenteurs nécessite de donner une confiance (inverse de l’erreur) à chacune des données assimilées et au modèle. Une grande confiance sur une donnée va amplifier son influence sur la qualité globale de la solution, alors qu’une faible confiance va localiser voire lisser son effet. Donner une confiance sur chacune des données à assimiler est une phase clé du schéma de l’assimilation. Or, les marégraphes et plus particulièrement les analyses des marégraphes, ne sont pas fournis avec des barres d’erreur qui sont tout autant d’information sur la qualité de la mesure, des erreurs instrumentales, des problèmes rencontrés au cours de l’analyse harmonique. De nombreux phénomènes peuvent expliquer ces erreurs. Nous avons donc eu recours à une méthode empirique de détermination des erreurs sur les mesures marégraphiques.

Nous estimons que les données WOCE et IAPSO sont de meilleures qualités que les données BHI (de façon générale). Les techniques de mesures et de décompositions harmoniques ne sont pas comparables. Ces données peuvent être distinguées par leur localisation. En effet, la banque IAPSO n’est composée que d’appareils de grand fond qui ne mesurent donc pas les phénomènes côtiers de la marée. Les analyses sont donc a priori meilleures. La plupart des données WOCE proviennent du même type d’appareil et les méthodes d’analyse pour en extraire les composantes de la marée sont robustes et bien vérifiées. Ces données peuvent être considérées comme fiable et de bonne qualité. Par contre les données BHI sont côtières et d’origine très diverses, donc de qualité variable. Ainsi, en classant les marégraphes suivant leur situation par rapport au fond océanique, nous pouvons déterminer empiriquement une confiance acceptable pour chacune des données. Au moyen de la carte bathymétrique des fonds marins utilisées dans la modélisation, nous avons classé les marégraphes sélectionnés pour l’assimilation en 4 familles :

Dans l’océan profond, les interactions entre les ondes sont faibles et ce sont de bonnes mesures (IAPSO, WOCE) qui permettent de déterminer les composantes de ces ondes de marée. C’est pourquoi, nous avons donné une confiance de 0,25 cm aux données de la zone de plein océan. Pour les zones côtières et insulaires, ce n’est pas le cas. Les analyses sont supposées être moins bonnes. Nous avons fixé leur confiance à 2,5 cm. Pour faire une transition entre les petits fonds et le plein océan, nous avons donné une confiance de 1 cm aux données de plateaux. Pour les données de la zone insulaire, après plusieurs essais numériques, nous avons finalement fixé leur confiance à 2.5 cm. Ces confiances ont été attribuées après concertations entre scientifiques ayant étudié et utilisés les mesures marégraphiques. Pour rendre compte de ces différente zones, nous donnons pour l’onde M2 la carte de répartition des marégraphes Figure 48. Les points rouges représentent les marégraphes côtiers, les verts, ceux de plateaux, les jaunes, ceux près des îles, et les bleus, les marégraphes de plein océan.


Figure 48 : Répartition des zones de marégraphes pour l’attribution des confiances

Le Tableau 18 présente le nombre de marégraphes assimilés par zone.
 

Onde
M2
S2
N2
K2
2N2
K1
O1
Q1
Côtiers
351
350
284
315
149
436
438
268
Plateaux
91
90
86
73
6
104
105
100
Iles
152
152
110
117
67
178
179
97
Pélagique
189
165
156
151
15
179
179
174
Total
783
757
636
656
237
897
901
639

Tableau 18 : Nombre de marégraphes par zone

Ce nombre de marégraphes est plus important en zone côtière. C’est la conséquence du nombre beaucoup plus élevé de ces appareils de mesure en petit fonds. Cependant, le nombre de marégraphes en zone pélagique est malgré tout assez important (un peu plus de 50% du nombre de marégraphes côtiers en moyenne). La qualité des mesures des marégraphes de pression de fond et la quasi-absence d’interactions entre les ondes en plein océan font que les analyses harmoniques des mesures de ces appareils sont bonnes, d’où leur importance dans notre sélection.

En outre, dans le cadre de l’assimilation de données, nous nous sommes placés en contrainte faible. C’est-à-dire que nous considérons que notre modèle n’est pas parfait. En effet, les équations ne sont pas exactement le reflet de la réalité, nous avons fait de nombreuses approximations et les problèmes numériques au cours de la résolution des équation par CEFMO ne sont pas inexistants. C’est pourquoi, nous imposons aussi une erreur sur le modèle. Comme nous ne pouvons pas quantifier directement cette erreur sur le modèle, nous l’estimons par le biais d’une erreur sur le forçage, en considérant que ce dernier à une variance uniforme et une covariance spatiale qui à la forme d’une gaussienne.

10.4 Qualité des solutions

Ainsi, la nouvelle formulation du modèle hydrodynamique nous a permis de calculer de nouvelles solutions à l’échelle globale. Grâce à la résolution par blocs, ces nouvelles solutions sont purement hydrodynamiques car elles ne sont forcées que par le potentiel astronomique et les effets de charges et d’auto-attraction. Les huit ondes M2, S2, N2, K2, 2N2, K2, O1 et Q1 sont donc calculées sous formes de solutions libres, affranchies des perturbations des conditions aux limites initiales imposées aux frontières ouvertes afin de permettre une convergence rapide des solutions.

Afin d’évaluer la qualité des nouvelles solutions FES98, nous avons effectué plusieurs comparaisons avec les autres modèles FES (FES94.1 et FES95.2.1). FES95.2.1 est une version réduites de FES95.2 :quelques zones littorales affectées par de gros problèmes de résonance ont été retirées. La qualité de la solution en est bien sur améliorée, mais, surtout, sa qualité en plein océan n’est pas occultée par les quelques zones côtières détériorées.

Nous avons effectué les comparaisons avec trois banques de données :

10.4.1.1 Comparaisons aux données marégraphiques pélagiques

La comparaison des solutions FES avec ST95 nous permet d’évaluer leur qualité en plein océan par rapport à la marégraphie. Le Tableau 19 illustre les améliorations sensibles que FES98 apporte pour toutes les ondes principales, excepté pour 2N2 pour laquelle beaucoup moins de données ont été assimilées. La précision atteint maintenant 1,5 cm pour une RSS de 2,41 cm. Il faut cependant noter qu’étant donné la qualité des données de la banque ST95, nous retrouvons quelques-unes unes de ces données de comparaison dans les données que nous avons assimilées. Ainsi 58 données de ST95 ont été assimilées pour obtenir FES98. C’est pourquoi, pour plus de fiabilité dans notre validation, nous avons comparé FES98 à d’autres banques de données.
 
Onde
RMS sur les données (cm)
Nombre de données
FES94.1
RMS (cm)
FES95.2.1 
RMS (cm)
FES98 
RMS (cm)
M2
33,55
95
2,85
1,74
1,51
S2
12,81
95
1,57
1,12
0,86
N2
6,79
91
0,91
0,89
0,80
K2
3,32
90
0,48
0,48
0,35
2N2
1,01
90
0,29
0,29
0,31
K1
11,10
95
1,19
1,17
1,00
O1
7,66
95
1,09
1,05
0,93
Q1
1,61
87
0,28
0,28
0,25
RSS
-
-
3,80
2,82
2,41

Tableau 19 : Comparaisons numériques pour ST95

10.4.1.2 Comparaisons aux données côtières

L’amélioration des solutions hydrodynamiques globales était un des objectifs à atteindre en produisant FES98. C’est pourquoi, de nombreuses données marégraphiques de qualité ont été assimilées en milieu côtier. Mais qu’en est-il de la qualité des solutions obtenues dans ces zones ? La banque ST727 nous offre un outil de comparaison intéressant pour l’évaluer (cf. Tableau 20), car elle est représentative des phénomènes locaux de marée le long des principales côtes de l’océan mondial. Les améliorations y sont importantes. Les comparaisons peuvent être considérées comme fiables car seulement 53 données de ST727 ont été assimilées dans FES98. En particulier, en comparant FES98 à la solution altimétrique FES95.2.1, ces améliorations sont d’un facteur 2. La RSS de FES98 le long des côtes est de 14,40 cm soit 4,03 cm de moins que FES94.1. Nous pouvons donc estimer que FES98 (en RSS par rapport à ST727) est 22% plus précise que FES94.1 jusqu’à présent considérée par la communauté scientifique comme étant la meilleure solution hydrodynamique en milieu côtier.
 
Onde
RMS sur les données (cm)
Nombre de données
FES94.1
RMS (cm)
FES95.2.1 
RMS (cm)
FES98 
RMS (cm)
M2
57,78
727
14,69
22,02
10,99
S2
22,04
725
6,84
18,82
5,56
N2
12,18
617
4,32
5,12
3,66
K2
6,54
616
2,54
2,54
2,24
2N2
1,84
263
1,18
1,18
1,09
K1
13,48
724
5,50
7,08
4,71
O1
9,74
720
4,37
4,54
3,56
Q1
2,01
402
1,09
1,08
1,11
RSS
-
-
18,43
30,74
14,40

Tableau 20 : Comparaisons numériques pour ST727

10.4.1.3 Comparaisons à l’altimétrie

Cependant, afin d’affiner encore plus les comparaisons, nous avons voulu comparer nos solutions par rapport à une troisième source de données indépendantes de la marégraphie. C’est pourquoi nous avons comparé nos solutions FES à une banque de données altimétriques issues de points de croisement T/P (Schrama, communication personnelle, 1999). Cette banque nous donne accès à l’analyse harmonique de la marée en plus de 5000 points pour les ondes de marée M2, S2, K2, N2, K1, O1, P1,et Q1. Les comparaisons montrent que FES95.2.1 est la meilleure solution comparée à cette banque (cf. Tableau 21), ce qui est a priori normal puisque cette solution FES a été obtenue en assimilant des données altimétriques T/P. Par contre, nous pouvons constater une amélioration certaine de FES98 par rapport à FES94.1 : 25% pour M2 et 11% pour K1.
 
Onde
RMS sur les données (cm)
Nombre de données
FES94.1
RMS (cm)
FES95.2.1 
RMS (cm)
FES98 
RMS (cm)
M2
25,85
5313
3,32
1,33
2,51
S2
9,71
5313
1,62
0,82
1,19
N2
5,59
5313
1,01
0,75
0,82
K2
2,83
5313
0,99
0,97
0,98
2N2
-
-
-
-
-
K1
10,00
5313
1,80
1,11
1,61
O1
7,20
5313
1,11
0,87
1,14
Q1
1,70
5313
1,61
0,83
0,83
RSS
-
-
4,72
2,57
3,73

Tableau 21 : Comparaisons numériques pour la banque Topex

10.5 Extension du spectre de marée

10.5.1 Décomposition du spectre

Dans le Chapitre 7, nous avons donné des décompositions de spectre basées sur les deux banques de données marégraphiques (ST95 et ST727). Ces deux décompositions sont représentatives de l’importance des différentes ondes du spectre à l’échelle globale, que ce soit en plein océan (ST95) ou le long des côtes (ST727). La Figure 16 illustre l’importance des différentes ondes dans la décomposition du spectre de marée. Nous avons calculé le pourcentage de RMS de chaque onde par rapport à la RMS globale.


Figure 49 : Importance des ondes dans la décomposition harmonique du spectre de marée pour ST95

Le Tableau 22 donne les importances en pourcentage des 8 ondes calculées.
 

Onde
Pourcentage d’importance
M2
33,5%
S2
12,6%
K1
10,1%
O1
7,0%
N2
6,8%
K2
3,3%
Q1
1,5%
2N2
1,0%
Total
75,9%

Tableau 22 : Pourcentage d’importance des principales ondes du spectre

Ainsi, les 8 ondes calculées ne représentent que 75,9% du spectre total de la marée déduit des 95 données marégraphiques de la banque ST95. La décomposition harmonique de ST95 montre que même en plein océan, les 8 ondes principales ne suffisent pas à expliquer tout le spectre. En effet, outre les ondes longues périodes Sa, Ssa, et Mm il existe 4 autres ondes (P1, n2, m2 et L2) dont l’amplitude est de plus de 1 centimètre et qui représente chacune plus de 1% du spectre.

Il apparaît donc clairement que compléter le spectre de marée est essentiel si nous voulons accroître la précision de la prédiction.

10.5.2 Ondes secondaires

10.5.2.1 Méthode d’admittance

Afin d’augmenter le nombre de composantes du spectre de marée il est possible de calculer de nouvelles ondes sans avoir recours à un nouveau modèle de marée identique à celui qui a permis d’obtenir les 8 ondes principales. Cette méthode repose sur le principe d’admittance qui s’appuie sur la méthode harmonique.

La méthode harmonique est basée sur un développement quasi périodique en temps du potentiel de marée donné par Doodson [1921]. Comme l’a montrée le Chapitre 4, il est composé de plus de 400 composantes. D’habitude, pour des prédictions de marées océaniques, un spectre simplifié est utilisé : seules les composantes majeures sont conservées. Des facteurs de corrections nodales, variant très lentement sur la période chaldéenne (18,61 années), sont alors introduits pour corriger ce spectre réduit.

10.5.2.2 L’approche par admittance

Une façon d’accorder les composantes secondaires aux composantes principales qui leurs sont voisines dans le spectre est de relier la réponse régulière de l’océan au potentiel astronomique. D’après Munk et Cartwright [1966], l’admittance est le rapport de l’onde de marée observée et de sa marée d’équilibre au méridien de Greenwich. Elle est donc dépendante de la fréquence de l’onde considérée. En reprenant les notations introduites par Le Provost et al. [1991], pour une composante de marée d’indice m, l’admittance est définie par :

(10.129)

avec :

Une façon d’obtenir ces fonctions d’admittance est d’utiliser la méthode harmonique classique et de définir des approximations analytiques parmi chacune des espèces diurnes et semi-diurnes.

10.5.2.3 Rappels sur la marée d’équilibre

Le calcul par admittance introduit la notion de marée d’équilibre définit comme étant la forme hypothétique globale qu’aurait la surface des océans si elle était en équilibre avec les forces engendrées par le potentiel générateur, en l’absence de toute inertie et de courants. Elle est communément approchée par le potentiel générateur multiplié par le rapport . Cependant des modifications sont à appliquer si le contour des continents et des océans est pris en compte.

La marée d’équilibre dérive du potentiel générateur (cf. paragraphe 4.2.3). Elle ne dépend que de la position du point considéré sur la surface des océans et de la classe de l’onde (semi-diurne, diurne, longue période). Pour un point de coordonnées  la marée d’équilibre (amplitude a, phase p) sera le coefficient d’équilibre donné par les tables de Doodson [1921] pour l’onde considérée, multiplié par un coefficient d’amplitude a et de phase p donnés par :
 

Les longitudes sont référencées par rapport au méridien de Greenwich.

10.5.2.4 Fonctions splines

Ainsi pour obtenir le coefficient d’admittance d’une onde secondaire, il suffit de faire une interpolation (voire une extrapolation) avec deux des coefficients d’admittance des ondes principales qui lui sont voisines (du point de vue de la période des ondes).

Cependant, une régression linéaire peut être trop grossière pour décrire la courbe d’admittance de certaines ondes secondaires dans certaines zones de l’océan global. C’est pourquoi des fonctions splines cubiques utilisant les caractéristiques de trois ondes de marée permettent de pallier ce problème. Cartwrigth et al. [1988] furent les premiers à introduire ces fonctions sous la forme :

(10.130)

avec :

Avec ces splines, la forme de la courbe d’admittance peut-être mieux ajustée.

En négligeant les effets radiationnels et non linéaires, les ondes 2N2, n2, m2, L2 et T2 peuvent être déduites par admittance.

Le même raisonnement peut-être appliqué à l’espèce diurne.

10.5.2.5 Calcul des ondes secondaires

Grâce aux calculs des solutions globales des 8 ondes principales (M2, S2, N2, K2, 2N2 pour les semi-diurnes et K1, O1, et Q1 pour les diurnes) et l’utilisation de la méthode d’admittance décrite au paragraphe 10.5.2.2 nous pouvons compléter le spectre de marée de FES98 avec des ondes secondaires. L’importance de ces ondes secondaires a été déterminée par des décompositions harmoniques de mesures marégraphiques. Ainsi, 19 ondes ont été calculées pour tous les points du maillage global éléments finis : Le spectre de marée de FES98 devient ainsi beaucoup plus complet.

10.5.3 Ondes longues périodes

Pour affiner encore plus le spectre de FES98, nous avons ajouté aux ondes principales et secondaires, trois ondes longues périodes déterminées par Lyard [1998] : Mf, Mm, et Mtm. Les ondes Mf et Mm ont été calculées par la méthode d’assimilation. L’onde Mtm est hydrodynamique.

10.6 Bilan sur FES98

Nous avons mis en place une nouvelle version de notre modèle hydrodynamique éléments finis combiné à une procédure d’assimilation. Les améliorations apportées par la résolution par blocs ont permis de calculer des solutions de marées à l’échelle globale affranchies de conditions imposées aux frontières ouvertes des sous domaines du maillage. Ces solutions libres, uniquement forcées par le potentiel astronomique et les effets secondaires d’auto-attraction et d’effets de charge, ont été calculées pour M2, S2, N2, K2, 2N2, K1, O1 et Q1. La méthode d’assimilation qui avait été utilisée pour FES95.2.1 a été revue et corrigée afin de ne plus avoir d’effets de résonance anormaux en quelques zones côtières. Pour chacune des huit ondes, une banque de plusieurs centaines de données réparties sur l’océan mondial et majoritairement le long des côtes, a été constituée. Ces données ont été soigneusement extraites des banques WOCE, IAPSO et BHI et ont été assimilées dans les solutions libres. Ces nouvelles solutions indépendantes de la mesure altimétrique ont été comparées à la marégraphie et l’altimétrie et montrent de réelles améliorations en particulier en zones côtières. Afin de compléter le spectre de marée 19 autres composantes ont été déduites par admittance : m2, n2, L2, l2,T2, e2, h2, P1, 2Q1, r1, s1, J1, c1, M11, M12, OO1, j1, p1, et q1. De plus, 3 ondes longues périodes ont été ajoutées : Mf, Mm et Mtm.

Ces nouvelles solutions éléments finis ont été projetées sur des grilles régulières et sont disponibles sur des grilles de 0,25°x0,25°.

Cependant comme nous l’avons vu dans les comparaisons, l’amélioration est très sensible en zone côtière et nettement moins en zone pélagique. En effet, la principale source d’amélioration est donnée par l’assimilation de marégraphes placés le long des côtes. Il nous manque donc de l’information en plein océan.

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Title: Thèse de Fabien Lefèvre
Issue: Version 1.0
Date: 29/09/2000